vendredi 19 août 2016


Interrogée sur sa contre-performance au relais 4 x 100 mètres, l’athlète chinoise, star des JO de Rio, a indiqué qu’elle avait ses règles. Sur les réseaux sociaux, ses fans saluent son courage.


Sa réaction pleine de joie et de spontanéité au moment même où elle apprenait son temps de qualification aux 100 mètres dos le 8 août restera comme l’une des images fortes des JO de Rio 2016.

Au fil de ses interventions dans les médias, la nageuse chinoise Fu Yuanhui a non seulement envoyé au placard l’image de l’athlète chinois robotique et marmoréen, mais est devenue une héroïne nationale en Chine, comme le souligne The Guardian, emportant des millions de fans sur les réseaux sociaux. 
Un pavé dans la piscine

La nageuse de 20 ans a encore surpris son monde en brisant un tabou particulièrement tenace dans le monde du sport : les règles.

Interrogée sur sa contre-performance au relais 4 x 100 m, dimanche 14 août, où l’équipe chinoise n’a obtenu qu’une quatrième place, elle a déclaré à la chaîne nationale CCTV (Télévision centrale de Chine) : “Je crois que je n’ai pas bien nagé aujourd’hui. J’ai l’impression d’avoir laissé tomber mes coéquipières.” “Des douleurs d’estomac ?” lui demande la journaliste qui la voit mal en point. Fu Yuanhui répond du tac au tac : 


C’est parce que mes règles sont arrivées hier, donc je me sens particulièrement fatiguée – mais ce n’est pas une excuse. Je ne nage quand même pas assez bien.”

Immédiatement, les réactions fusent sur les réseaux sociaux. Ses fans la remercient d’avoir brisé le silence qui entoure les cycles menstruels des athlètes femmes. D’après la BBC, un utilisateur de Weibo, le Twitter chinois, écrit par exemple : 


J’admire vraiment Fu Yuanhui d’avoir nagé alors qu’elle avait ses règles – les femmes sont très affectées par leurs règles, surtout quand celles-ci s’accompagnent de douleurs.”

“Beaucoup disent qu’ils ne savaient pas qu’une femme pouvait nager pendant ses règles”, rapporte encore The Guardian. Si l’on en croit la traduction de plusieurs passages de Weibo par le webzine Shanghaiist, un autre fan s’est exclamé :“Wahou, c’est la première fois qu’une athlète admet qu’elle a ses règles.” D’après les médias anglo-saxons, la sortie de Fu Yuanhui apparaît d’autant plus audacieuse que la Chine est “en retard” sur ce sujet.

“Huit décennies après les premières ventes de tampons aux Etats-Unis, on observe une résistance culturelle bien ancrée”, commente le quotidien de Londres. Une récente étude montre que seulement 2 % des Chinoises ont recours aux tampons. Un retard qui serait dû, selon USA Today, à la désinformation et à cette fausse idée selon laquelle les tampons pourraient provoquer la perte de la virginité. 
Un problème universel


Ce n’est pas la première fois que le sujet fait l’objet de l’attention des médias. Au cœur de l’été 2015, la militante Kiran Gandhi avait fait sensation en courant le marathon de Londres sans tampon alors qu’elle avait ses règles. Une expérience qu’elle avait ensuite relatée dans Medium.

Marisa Kabas, la journaliste qui couvre notamment les questions de sexualité pour le magazine américain Fusion, estime que l’impact des règles sur les performances des athlètes n’a pas été suffisamment étudié pour tirer des conclusions pertinentes. Comme si le tabou qui entoure les règles empêchait les chercheurs de se penche vraiment sur ce sujet. “Même dans les sociétés occidentales où les tampons sont monnaie courante, les femmes sont jugées si elles osent dire que ce sont leurs règles qui ont affecté leur performance. […] Avec des athlètes comme Yuanhui, le silence va enfin être brisé”, conclut-elle.

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